L’agrogénétique au service de la consommation carnée: le point d’orgue des OGM
Posté par ... le 5/4/2008
En 2007, selon l’organisation promotrice des OGM: l’ISAAA, les deux plus grandes cultures de semences transgéniques alimentaires en terme de surface dans le monde sont: le soja et le maïs. Leurs caractéristiques sont: soit de "tolérer" un herbicide, soit de "résister" à un insecte, soit les deux en même temps (hybridation des variétés GM "tolérante" et "résistante").
Cette production considérable (près de 60 millions d’hectares cultivés pour le soja GM, et plus de 30 millions d’hectares pour le maïs GM) est principalement destinée à l’alimentation des bétails américains et européens. En effet, "les cultures transgéniques restent concentrées - à 77 % - dans quatre pays : Etats-Unis (50 %), Argentine, Brésil et Canada, selon l’Isaaa. L’Inde et la Chine cultivent aussi les OGM en quantités importantes, [mais] essentiellement le coton." (1) Actuellement, toujours selon l’ISAAA, 61% du soja cultivé dans le monde est génétiquement modifié pour résister à un herbicide, principalement le dangereux RoundUp(2), et 24% du maïs cultivé dans le monde est génétiquement modifié. Loin de changer les pratiques de développement agricole, pour une meilleure répartition des protéines végétale et animale produites dans le monde, le développement des agrobiotechnologies s’inscrit dans le prolongement d’une agriculture centrée sur la consommation carnée occidentale, grande consommatrice d’eau et de protéines végétales, et tournée exclusivement vers la conquête de nouveaux marchés, pas vers la résolution des problèmes alimentaires mondiaux urgents, dont beaucoup sont générés par ce même système de développement. Ainsi, l’”Afrique a subi de plein fouet les effets pervers de l’aide alimentaire, qui a tué les cultures vivrieres traditionnelles au profit de céréales venues d’ailleurs, et notamment des pays développés, sous la pression des lobbies céréaliers“(3).
Alors que les hommes et les animaux deviennent les cobayes d’une agriculture génétiquement modifiée développée grâce au pouvoir de la finance et de l’industrie, et que des entreprises s’apprêtent à utiliser certains animaux comme des usines pour une production de masse de molécules diverses, aux effets parfois gravement délétères sur leur santé, la question du bien-être animal fait figure de préoccupation secondaire dans nos sociétés de consommation. Dans un monde où la guerre est banalisée et vient conforter les idéologies des nations les plus puissantes, le sort réservé aux animaux d’élevage, souvent cruel, n’est que très peu pris en compte. Au XIIIième-XIVième siècle, Léonard De Vinci affirmait: "Le jour viendra où les personnes comme moi regarderont le meurtre des animaux comme ils regardent aujourd’hui le meurtre des êtres humains." Nul doute que cet artiste visionnaire était très en avance sur son temps, car le meurtre des êtres humains est encore affaire courante pour les grandes puissances ou communautés de pouvoir, de manière tout à fait légitimée et institutionnalisée, que ce soit au nom des concepts de démocratie, de dieu, ou de liberté, limités par les vues étroites de chaque nation, organisation, religion ou culture traditionnelle.
De nos jours, cependant, le courant culturel écologique et de "nombreuses" associations végétariennes commencent à critiquer ouvertement cette tendance alimentaire à la surconsommation de viande, préjudiciable à la santé et à l’environnement, et le traitement cruel réservé aux animaux d’élevage par l’agro-industrie. Pour des raisons multiples, allant de l’éthique aux questions purement environnementale et agronomique, ou plus politique et morale, la consommation de viande est ainsi remise en cause, au sein même des sociétés dans lesquelles elle est fortement ancrée dans les moeurs. Aussi, certains n’hésitent plus à présenter publiquement des thèses radicales comme l’abolition de la viande, comme mesure sociétale et souhaitable d’un point de vue politique. Malheureusement, une grande partie de la population n’est déjà pas sensibilisée à son propre bien-être, devant lutter parfois difficilement pour survivre ou vivre dans une société d’inéquité. Devant ces injustices humaines, le bien-être animal peut être ainsi déconsidéré et parfois à juste titre. Mais la comparaison semble toutefois profondément inefficiente et inadéquate, car les personnes peu sensibilisées à la souffrance humaine, ne seront pas forcément plus sensibilisées à la souffrance animale et vice et versa.
Cette thèse de l’abolition de viande comme mesure politique et revendication publique a été explicitée dans le numéro 29 des cahiers antispécistes de février 2008, dont voici le résumé, et la totalité sur le site de la revue:
Résumé : La thèse défendue dans cette brochure est qu’il faut dès maintenant oeuvrer explicitement à l’interdiction légale de la production et de la consommation de chair animale. C’est à la fois une mesure nécessaire et une mesure qu’il est possible d’obtenir sans attendre une révolution des mentalités ou de l’organisation de nos sociétés. « On ne doit pas maltraiter ou tuer des animaux sans nécessité » : partout dans le monde, ce précepte fait partie de la morale commune. Partout dans le monde, la consommation alimentaire de produits animaux est la cause principale pour laquelle des humains maltraitent et tuent des animaux, sans nécessité. Le précepte précité n’est pas dénué d’impact : des personnes refusent de consommer des produits d’origine animale, d’autres réduisent leur consommation de viande, d’autres encore choisissent des produits issus d’élevages offrant quelques garanties sur le traitement des animaux ; des pays adoptent quelques lois protégeant les animaux d’élevage. Mais cela ne suffit pas à inverser la tendance : le nombre d’animaux élevés et pêchés dans le monde croît inexorablement, tandis que l’élevage industriel se généralise. Il est illusoire d’attendre que les dispositions adoptées en faveur du bien-être animal finissent par assurer des conditions de vie et de mort décentes aux milliards d’animaux mangés chaque année : les éleveurs peuvent difficilement se résoudre à faire passer le bien-être des bêtes avant la rentabilité de leur exploitation, et on ne dispose ni des espaces ni de la main d’oeuvre requis pour traiter tant d’animaux avec soin. La prise de conscience du fait que production de chair animale a un impact environnemental désastreux ne conduira pas nécessairement à une amélioration du sort réservé aux bêtes : si l’intérêt des animaux n’est pas pris en compte en tant que tel, cette prise de conscience peut au contraire déboucher sur une intensification de l’élevage. Le contraste entre les devoirs que les humains reconnaissent avoir envers les bêtes et la façon dont ils les traitent concrètement n’implique pas que les bonnes intentions affichées ne soient qu’hypocrisie. Ce contraste nous apprend toutefois que les changements spontanés de comportement des consommateurs ne constituent pas une force suffisante pour mettre fin à la boucherie. Il y a des raisons à cela. C’est par ailleurs une situation très commune : on ne réussit pas non plus à résoudre les problèmes de l’insécurité routière, de la pollution, de la misère humaine, de la maltraitance des enfants… en comptant uniquement sur la capacité de chacun à modifier ses habitudes pour y porter remède, même lorsqu’il qu’il est largement admis qu’il s’agit de maux. Pour mettre un terme au sort hideux réservé aux animaux mangés, il faut que la question soit portée (aussi) au niveau politique. Il s’agit d’enclencher un processus qui s’achèvera par l’adoption de lois interdisant la prédation (chasse, pêche) et la production (élevage) d’animaux pour la consommation humaine. Les institutions publiques ont également un rôle à jouer dans la reconversion des travailleurs dont le revenu dépend de ces activités. Ce processus commence par l’expression publique de la revendication d’abolition de la viande. |
1) Hervé Kempf, Les surfaces cultivées en OGM ont augmenté de 12% en 2007, Le Monde, 15/02/08
2) Le glyphosate est toxique et le RoundUp est encore plus mauvais, ISIS Press Release, mars 2005
Le Roundup n’est pas "biodégradable" ni "bon pour l’environnement", Marie-Monique Robin, blog Le Monde selon Monsanto, 04/03/08
3) Problèmes alimentaires du monde, site Géoscopie.